Existe-t-il un texte juridique qui peut obliger et, le cas échéant, sanctionner les copropriétaires ne respectant pas ce seuil de chauffe ?
Existe-t-il un texte juridique qui peut obliger et, le cas échéant, sanctionner les copropriétaires ne respectant pas ce seuil de chauffe ?
Le plan de sobriété énergétique présenté par le Gouvernement le 6 octobre 2022 appelle notamment les copropriétés à ne pas chauffer leurs logements à plus de 19 degrés. Mais concrètement, existe-t-il un texte juridique qui peut obliger et, le cas échéant, sanctionner les copropriétaires ne respectant pas ce seuil de chauffe ?
Face à la crise énergétique et l’envolée des prix du gaz et de l’électricité en découlant, de nombreux médias ont rappelé l’existence d’une législation de 1974 qui impose une obligation de ne pas chauffer son logement à plus de 19 degrés.
En effet, l’article 2 de la Loi n° 74-908 du 29 octobre 1974 relative aux économies d’énergies prévoyait que « la mise en œuvre des installations de chauffage (…) doit être assurée de façon à limiter la température de chauffage (…) ». Le seuil de température maximal étant définit par décret.
Ce texte avait été introduit afin de limiter la consommation énergétique des foyers, à la suite du choc pétrolier de 1973.
Bien que cette disposition ait fait l’objet d’une abrogation par une ordonnance du 9 mai 2011, une législation sur ce sujet est toujours en vigueur.
D’une part, l’alinéa 2 de l’article R. 171-11 du Code de la construction et de l’habitation prévoit que :
« Les équipements de chauffage du logement permettent de maintenir à 18° C la température au centre des pièces du logement. Ils comportent des dispositifs de réglage automatique du chauffage qui permettent notamment à l’occupant d’obtenir une température inférieure à 18° C.« .
En l’espèce, la disposition introduit seulement une obligation incombant aux constructeurs des immeubles ou aux propriétaires-bailleurs d’installer des équipements qui maintiennent une température à 18 degrés. Aucune obligation de température maximale s’imposant aux copropriétaires ne peut donc être envisagée sur ce fondement.
D’autre part, et surtout, l’article R. 241-26 du Code de l’énergie, introduit par un décret du 30 décembre 2015, dispose que :
« Dans les locaux à usage d’habitation, d’enseignement, de bureaux ou recevant du public et dans tous autres locaux, à l’exception de ceux indiqués aux articles R. 241-28 et R. 241-29, les limites supérieures de température de chauffage sont, en dehors des périodes d’inoccupation définies à l’article R. 241-27, fixées en moyenne à 19° C :
-pour l’ensemble des pièces d’un logement ;
– pour l’ensemble des locaux affectés à un usage autre que l’habitation et compris dans un même bâtiment. »
Il existe donc bel et bien une législation qui impose aux copropriétaires une obligation de température maximum de chauffage à 19 degrés.
Les manquements à cette obligation pouvant, en théorie du moins, être sanctionnés d’une contravention de cinquième classe, soit 1 500 euros au plus (montant pouvant être doublé en cas de récidive, R. 241-29-1 du Code de l’énergie).
Toutefois, le texte s’avère bien mois prescriptif que la législation de 1974.
En premier lieu, l’article précité pose une limite fixée en moyenne à 19 degrés mais il ne prévoit aucune précision sur l’étendue de la période permettant de constituer une moyenne, ce qui suffit à le priver de tout caractère obligatoire.
En deuxième lieu, il est matériellement impossible de contrôler sur une période (non-définie) toutes les pièces d’un logement. Plus encore, au sein d’une copropriété, il faudrait concrètement contrôler simultanément toutes les pièces de l’ensemble des lots à usage d’habitation, ce qui s’avère encore moins envisageable.
En dernier lieu, il est prévu à l’alinéa 2 de l’article R. 241-29 du même Code qu’est « puni de la même peine l’opposition à l’exercice des fonctions des agents chargés de constater les infractions« . Toutefois, en l’état actuel du droit, aucun texte ne donne compétence à des agents de constater ces infractions énergétiques. A fortiori, seules les forces de l’ordre pourraient se voir déléguer cette compétence qui serait alors fortement encadrée.
Pour rappel, si l’article 20 de la Loi n° 2021-1520 du 25 novembre 2021 vient faciliter l’accès aux forces de sécurité au sein des parties communes des copropriétés à des fins d’intervention, ces dernières ne peuvent rentrer dans des parties privatives qu’à la condition qu’une enquête judiciaire ait été préalablement diligentée.
Par conséquent, ce texte s’avère juridiquement et techniquement impossible à appliquer. La température maximale de chauffe fixée à 19° ne pouvant constituer qu’une recommandation du Gouvernement visant à sensibiliser le comportement énergétique des copropriétaires et locataires.
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