Le droit de la copropriété évolue constamment, en lien étroit avec les évolutions sociétales et les priorités politiques définies par le Gouvernement. Bien que chaque situation puisse présenter des spécificités législatives, la solution juridique applicable demeure fréquemment la même : la mise à jour du règlement de copropriété.
En effet, qu’il s’agisse de formaliser une interdiction (par exemple, pour les dark-stores, points-relais-colis ou AirBnB) ou de confirmer l’existence et l’opposabilité d’un droit (notamment les lots transitoires, les parties communes spéciales ou les parties à jouissance privative), le règlement de copropriété constitue le document contractuel fondamental régissant l’organisation et la gestion d’un immeuble en copropriété.
L’une des priorités actuelles est la lutte contre les passoires énergétiques, avec un encadrement législatif de plus en plus strict qui impose au Syndicat des copropriétaires, assisté par le Syndic, de procéder à des diagnostics énergétiques (DPE, DTG, PPPT) ainsi qu’aux travaux de rénovation y afférents.
Cependant, ces obligations légales ne peuvent être efficacement mises en œuvre sans une mise en conformité adéquate du règlement de copropriété. Une absence de mise à jour du règlement de copropriété est susceptible d’exposer le Syndicat des copropriétaires à un risque contentieux majeur, notamment dans le cas d’une contestation de la répartition des charges afférentes aux travaux de rénovation énergétique. Un arrêt récent rendu par la Cour d’appel de Paris le 12 mars 2025, dans une affaire où notre cabinet représentait le Syndicat des copropriétaires, rappelle fermement ces obligations. Décryptage.
1) Quels sont les faits à l’origine du contentieux ?
Dans cette affaire, il est question d’un litige concernant des charges de copropriété dans un immeuble situé à Paris. L’immeuble est composé de deux bâtiments, l’un sur rue et l’autre en fond de cour. Une société – propriétaire de plusieurs lots dans cet immeuble, dont certains sont utilisés comme restaurant et d’autres comme hôtel – conteste la répartition des charges liées à des travaux de ravalement de façades sur cour, votées lors d’une Assemblée générale des copropriétaires en septembre 2018 au sein de laquelle la résolution prévoyait d’imputer le financement de ces travaux de rénovation énergétique sur les charges communes générales.
La société a été sommée de payer des arriérés de charges, mais elle refuse, au moyen que la répartition des charges était contraire au règlement de copropriété dans la mesure où ce dernier prévoyait une grille de répartition des charges spéciales selon laquelle « les dépenses qui s’appliqueront exclusivement à un bâtiment, seront réparties uniquement entre les copropriétaires de ces bâtiments respectifs et spécialement les travaux d’entretien et réparation de toute nature ». Or, puisque les travaux de ravalement ne concernaient pas le même bâtiment de l’ensemble, la société s’oppose au paiement des charges relatives aux travaux de rénovation.
Le Syndicat des copropriétaires a alors assigné la société en justice pour obtenir le paiement des sommes dues. Le Tribunal de première instance a rejeté la demande d’annulation de la résolution de l’Assemblée générale et a condamné la société à payer les charges impayées. Cette dernière décide donc d’interjeter appel devant la Cour d’appel de Paris.
2) Quelle est l’analyse juridique de la Cour d’appel ?
La Cour d’appel de Paris, par un arrêt confirmatif, valide la décision de première instance en se fondant principalement sur deux motifs :
D’une part, la Cour considère que la stipulation litigieuse du règlement de copropriété, relative aux dépenses applicables uniquement à un bâtiment pour des « travaux d’entretien et de réparation de toute nature », ne concerne pas les travaux de ravalement de façades. Ces derniers étant expressément visés par une autre clause du règlement qui les soumet au financement par les charges communes générales.
Ainsi, étant entendu que le spécial déroge au général, il convient de faire application de la clause relative au ravalement de façades, de sorte que tous les copropriétaires de l’ensemble devaient contribuer à son financement.
D’autre part, les magistrats écartent la clause de répartition de charges spéciales, au motif qu’elle n’est pas rattachée à une stipulation définissant précisément les parties communes spéciales concernées. Ce motif s’appuie sur l’article 6-2 de la Loi du 10 juillet 1965, issu de la Loi ELAN, qui impose une mention expresse des parties communes spéciales dans le règlement de copropriété ainsi qu’une correspondance stricte avec la grille de répartition des charges spéciales.
3) Que doit-on en retenir ? Quel conseil peut-on donner aux Syndicats de copropriétaires ?
Deux enseignements juridiques doivent être tirés de cette décision afin de sécuriser les procédures et se prémunir de ce type de contentieux : l’un est légal, l’autre procède de la jurisprudence.
En premier lieu, il convient de retenir qu’il ne peut y avoir de charges spéciales sans parties communes spéciales identifiées expressément dans le règlement de copropriété. Cette exigence procède d’une lecture combinée des articles 6-2 et 6-4 de la Loi du 10 juillet 1965 selon lesquels la création de parties communes spéciales est indissociable de l’établissement de charges spéciales à chacune d’entre elles et que l’existence de ces parties est subordonnée à leur mention expresse dans le règlement de copropriété, sans quoi la clause pourra être écartée par le juge.
En second lieu, la jurisprudence vient préciser la portée de dispositions précitées précisant que l’existence d’une clause prévoyant des parties communes spéciales, sans grilles de charges correspondantes, n’aura pas vocation à s’appliquer. De même, une clause de répartition des charges spéciales, sans avoir explicitement identifié les parties communes spéciales dans une clause distincte, ne permettra également pas de se prévaloir de la première.
Dans les deux cas, le financement des travaux de rénovation (également énergétique) devra être supporté par l’ensemble des copropriétaires sur la base des charges générales et, ce, quelle que soit la nature de l’opération, même si ces derniers ne concernent qu’un bâtiment de la copropriété. Cette jurisprudence est d’ailleurs suivie à droit constant, ce qui atteste du caractère consolidé de cette interprétation depuis un arrêt de la Cour de cassation de 2015 (Civ. 3e, 19 nov. 2015, n° 14-25.510).

En somme, bien qu’aucun texte ne sanctionne directement l’absence de mise à jour du règlement de copropriété, une telle omission crée une insécurité juridique majeure, particulièrement en matière de travaux de rénovation énergétique pouvant impliquer des coûts très importants.
Dès lors, nous ne pouvons à l’évidence que vous conseiller de faire réaliser un audit des règlements de copropriété des immeubles dont vous avez la gestion et, en cas d’inconformité, réaliser une mise à jour afin de sécuriser ce document et vous prémunir de contentieux bien plus coûteux.
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